Quand la sécurité touche tout le monde!
Dans la majorité des arénas du Québec, les choix technologiques liés aux réfrigérants qui seront faits dans le cadre d’un programme de subvention du gouvernement du Québec auront des impacts sur la population, sur la sécurité des travailleurs municipaux (cols bleus, cols blancs, policiers et pompiers), sur le développement futur autour de cet établissement, ainsi que sur vos budgets.
Si vous opérez actuellement un aréna à l’ammoniac, que vous pensez remplacer le Fréon, ou que vous construisez une nouvelle glace, lisez cet article afin de connaître ces différents impacts et comment il est possible de les réduire.
Historique
En novembre 2012, la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec (MELS) annonçait l’octroi de subventions visant à soutenir la modification ou le remplacement de systèmes de réfrigération fonctionnant aux gaz R-12 ou R-22 à 31 arénas et centres de curling dont les projets avaient été jugés admissibles. Ces substances – aussi connues sous le nom commercial de Fréon – n’auront plus cours dans 24 pays industrialisés d’ici 2020, en vertu du Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, signé en 1997.
Le Québec compte 425 arénas et 75 centres de curling1, dont 62,4 % de ces bâtiments utilisent l’un ou l’autre de ces gaz. Par quoi seront-ils remplacés? Le dioxyde de carbone (CO2) et l’ammoniac (NH3) sont les solutions les plus avancées. L’ammoniac est un gaz beaucoup plus toxique que le dioxyde de carbone. Toutefois, chacun d’eux présente des avantages et des inconvénients, tant sur le plan des opérations que celui de la santé et de la sécurité.
Malgré tout, quelques 30 % de ces 500 bâtiments sont pourvus d’un système de réfrigération à l’ammoniac. Or, plusieurs fuites d’ammoniac ont entraîné une évacuation des travailleurs et de la population avoisinante au cours des dernières années. Ces fuites démontrent que l’installation et l’entretien des systèmes de réfrigération ne sont pas toujours adéquats ou des plus sécuritaires et peuvent générer des risques technologiques. Par exemple, des évacuateurs conventionnels de système de ventilation d’urgence installés sur les toits ramènent vers le bas les gaz toxiques, qui se répandent alors dans tout le quartier et ce, au gré des vents dominants. Ou encore, des systèmes de ventilation d’urgence expulsent les gaz toxiques sur le côté des bâtiments, exposant ainsi les sportifs et leurs partisans évacués d’urgence.
Par ailleurs, la Direction régionale de la santé publique de la Capitale-Nationale estime « que l’utilisation de grands volumes d’ammoniac dans les systèmes de réfrigération des arénas pourrait représenter des risques à la santé pour une population située en périphérie lors d’un relâchement accidentel ». Celle-ci s’est opposée, en 2012, à ce que l’aréna Giffard située à Québec utilise 3 000 livres d’ammoniac dans le système, tant que l’aréna ne sera pas doté d’un plan de mesures d’urgence personnalisé.
Aider les décideurs municipaux
Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur « affaires municipales » (APSAM), la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) et le ministère de la Sécurité publique (MSP) se sont préoccupés du volet sécurité depuis l’annonce du programme de financement du MÉLS en 2010.
Plusieurs initiatives ont été entreprises :
- les organismes participants ont déposé leurs mémoires respectifs auprès du MELS afin de le sensibiliser aux enjeux de sécurité publique;
- les ingénieurs de la Ville de Montréal ont fait preuve d’ingéniosité et de leadership en minimisant les volumes d’ammoniac utilisés et en intégrant des composants visant la réduction du risque dans la conception de leurs arénas. (Voir la présentation de Claude Dumas et Costas Labos : Système frigorifique NH3 dans les arénas de la Ville de Montréal);
- la Ville de Rimouski, qui a vécu l’expérience d’une fuite toxique majeure en avril 2009, a amélioré son état de préparation et ses stratégies d’intervention. (Voir la présentation de Bertin Santerre du Service de sécurité incendie : Une fuite d’ammoniac à Rimouski);
- les Directions de la santé publique (DSP), notamment celles de Montréal et de Québec, le MSP, la CSST et l’APSAM sont intervenus auprès de municipalités afin de les sensibiliser à la sécurité des travailleurs et de la population.
En mai 2012, la Ville de Québec, au nom des dix plus grandes villes de la province, expédiait au sous-ministre du MSP une lettre dans laquelle elle soulignait que le choix de l’ammoniac comme principal réfrigérant en remplacement du Fréon était fait « sans égard aux risques qu’il peut engendrer pour les utilisateurs et les citoyens du secteur où sont localisées ces infrastructures ». Elle demandait donc qu’une analyse de risques soit élaborée afin d’aider l’ensemble des municipalités du Québec à concevoir des infrastructures sécuritaires et à se doter de plans de mesures d’urgence.
Afin de donner suite à cette demande, le MSP a mis sur pied, en octobre 2012, le Comité sur la gestion des risques technologiques associés aux réfrigérants dans les arénas et les installations de loisirs2. Ce comité composé d’une vingtaine d’experts avait pour mandat de documenter les risques liés aux divers types de réfrigérants et de fournir des outils d’aide à la décision et à l’intervention, afin que les décideurs municipaux soient en mesure de prendre une décision éclairée en tenant compte de la sécurité publique et de celle des travailleurs lors de la sélection du réfrigérant de substitution.
Dès lors, l’APSAM a publié un communiqué à tous les gestionnaires d’arénas afin de les conscientiser aux enjeux de la sécurité pour les travailleurs ainsi qu’aux enjeux de sécurité publique et fournir aux municipalités des orientations en matière de réduction du risque à la source. L’APSAM a insisté, entre autres, sur la nécessité de respecter les dispositions du Règlement sur la santé et la sécurité du travail et du Code sur la réfrigération mécanique – CSA B-52. Dans le cadre de la mise à jour de ce code par l’Association canadienne de normalisation (CSA), l’APSAM et d’autres organismes membres du comité ont transmis à la CSA une lettre d’appui aux propositions de la Ville de Montréal, qui visent à bonifier l’annexe F concernant les mesures d’atténuation du risque lors de la conception des systèmes.
Vous pouvez consulter, la liste des fuites d'ammoniac survenues dans des arénas au Québec depuis 2012 et qui ont été publiées dans les journaux.
Plusieurs recommandations, porteuses et prometteuses, ont émané de ce comité afin de rehausser la connaissance du risque par les différents acteurs impliqués et de proposer différentes mesures de traitement. Ainsi, le MSP entend analyser ces recommandations et soumettre un rapport au Comité sur la gestion des risques associés aux matières dangereuses (CGRMD). Le CGRMD, qui regroupe douze ministères et organismes, a été mis sur pied au printemps 2013 et vise à mettre en place les conditions favorables devant permettre d’assurer, au Québec, une gestion efficace et concertée des risques associés aux matières dangereuses. Ce dernier prendra connaissance du rapport et proposera, en 2014, des priorités d’action. Les résultats des travaux seront communiqués à l’ensemble des partenaires impliqués.
En septembre et novembre 2013, l’AQAIRS (Association québécoise des arénas et installations récréatives et sportives) et l’AQLP (Alliance québécoise du loisir public) ont organisé des formations en collaboration avec l’APSAM, les Agences de santé publique de Montréal et Québec et CamnetÉnergie (Ressources naturelles Canada), pour informer les gestionnaires des arénas, les équipementiers et les firmes de consultants. À la fin de ces formations, les personnes présentes ont exprimés l’urgence de communiquer ces informations non seulement aux gestionnaires qui n’étaient pas présents, mais aussi aux autres décideurs municipaux qui peuvent influencer le choix des technologies dans la conception de ces infrastructures afin de diminuer les coûts directs et indirects liés à la sécurité des travailleurs et de la population. Les présentations de ces formations sont disponibles sur la page Qualité de l'air dans les arénas.
En décembre 2013, l’APSAM a fait parvenir ses recommandations à l’Alliance pour la Gestion sécuritaire des matières dangereuses composée de représentants de l’ASCQ, du CRAIM et de RECO Québec afin qu’elle puisse les inclure à celles des institutions publiques, des entreprises privées, des associations professionnelles et des regroupements de citoyens qui ont participé à leur Webinaire. Celles-ci sont contenues dans le document Recommandations pour une gestion sécuritaire des matières dangereuses : document de travail.
C’est donc en réponse aux besoins exprimés par le milieu que l’APSAM a organisé en 2014 des rencontres spéciales dans plusieurs régions du Québec afin de réunir les acteurs municipaux concernés pour les aider à faire les bons choix dès la conception dans le but d’assurer au moindre coût la sécurité des travailleurs et de la population.
Pour obtenir de plus amples informations, vous pouvez contacter nos conseillères :
Amélie Trudel
514 849-8373 ou 800 465-1754 au poste 229
Élaine Guénette
514 849-8373 ou 800 465-1754 au poste 228
2 Les organisations membres du comité sur la gestion des risques technologiques associés aux réfrigérants dans les arénas et installations de loisirs
- ACSIQ: Alain Chaussé et Dany Robitaille
- APSAM: Élaine Guénette
- AQAIRS: Gilles Auger et Marie-Josée Roy
- ATPIQ: Hamel Rudy
- CanmetÉNERGIE: Daniel Giguère
- Communauté de pratique des 10 grandes villes du Québec
- CRAIM: Robert Reiss et Dimitri Tsingakis
- CSST: Michel Gagné
- JP Lacoursière Inc. et Université de Sherbrooke: Jean-Paul Lacoursière
- MÉLS: Jérémie Couture et Jean Drouin
- MSP: Sany Maltais
- MSP, DR Montérégie: Christine Gagnon
- ASSS, DRSP de Montréal: Luc Lefebvre (et INSPQ)
- ASSS, DRSP de Québec: Slavko Sebez
- Transport Canada: Ève Poirier
- Sécurité civile de Lévis: Marc Guay
- Ville et SSI de Montréal: Claude Dumas et Myriam Fernet
- Ville, Sécurité civile et SSI de Québec: Alain Gadbois, Doris-Gilles Lafleur, Simon Tremblay
- SSI de Rimouski: Bertin Santerre
- Sécurité civile et SSI de Sherbrooke: Jean-Pierre Sabourin et Gaétan Drouin