Le milieu de la prévention des incendies au Québec est au fait, depuis plusieurs années déjà, de l’importance que représente l’appareil de protection respiratoire isolant et autonome (APRIA) pour la santé et la sécurité des pompiers. Cependant, comme les méthodes opérationnelles changent avec le temps et que la compréhension des risques inhérents aux fumées des incendies évolue, un rappel concernant l’utilisation sécuritaire de cet appareil de protection est nécessaire.
Utilisation de l’APRIA chez les pompiers : redoublez de vigilance en hiver!
Aujourd’hui, en opération extérieure, les pompiers utilisent l'APRIA de façon systématique pour se protéger des gaz toxiques et cancérogènes, ce qui n’était pas pratique courante par le passé. En période hivernale, l'APRIA est alors utilisé dans un contexte où les températures sont souvent au point de congélation pendant une période prolongée. Pour limiter les risques lors de l’utilisation de celui-ci, les pompiers sont formés à connaître les limites de l’APRIA et à appliquer différentes techniques de respiration afin de réussir à évacuer sécuritairement un bâtiment en cas de défaillance de celui-ci ou par exemple, en cas d’effondrement de structures. Pour cela, depuis 2008, la réussite de la formation d’auto-sauvetage est obligatoire afin d’obtenir la diplomation nécessaire à l’exercice de la profession, et ce, pour l’ensemble des pompiers québécois. Il s’avère donc important, à cette période de l’année, de faire une mise au point en ce qui concerne la possibilité de la formation de givre ou de gel au niveau du régulateur deuxième niveau et de la partie faciale. En effet, en gelant, l’écoulement de l’air se fait en continu, à débit élevé, ce qui provoque la vidange rapide de la bouteille d’air respirable. En plus de mesures préventives liées à la conception, la majorité des manufacturiers émettent des mises en garde en lien avec la possibilité de défaillance de l’appareil lors de l’utilisation en basse température.
Comment expliquer la présence de givre ou de gel au niveau du régulateur de deuxième niveau ou bien de la partie faciale lors de l’utilisation en basse température?
Au niveau du régulateur de premier niveau, c’est un phénomène thermodynamique (détente adiabatique) qui est à l’origine de cette possibilité. Ce phénomène fréquent, connu par le milieu, se produit en raison du refroidissement qui a lieu lors de la détente de l’air. Mais comment expliquer qu’il peut y avoir présence de givre ou de gel dans le régulateur de deuxième niveau situé à la hauteur de la partie faciale du pompier sachant que la pression d’air est beaucoup moins élevée?
Selon un avis aux utilisateurs publié par NIOSH en 1982, disponible sur le site de la CNESST, ainsi qu’à la consultation de l’annexe D de la norme CSA Z94.4-11, la présence de gel au niveau du régulateur de deuxième niveau serait étroitement associée à l’humidité de l’air exhalé par le pompier lors de l’utilisation ou bien de l’humidité présente en raison d’un assèchement insuffisant des composantes de l’appareil.
L’accumulation de particules d’eau dans le régulateur ou la valve d’expiration de la partie faciale se condense, donc une certaine quantité peut s’accumuler dans le régulateur ou la partie faciale selon le design du manufacturier.
De plus, lorsque l’appareil a été porté en situation de chaude température (secteur 1), si le régulateur ou la partie faciale est enlevée dans des milieux à basse température, cela peut créer une présence de givre ou de gel qui nuira au bon fonctionnement de l’appareil lors de sa réutilisation.
Méthodes recommandées pour la prévention des risques
Dans le but de prévenir les risques et d'éviter pareille situation, l'APSAM tient à rappeler quelques mesures de sécurité. Les méthodes recommandées afin de diminuer la possibilité que cela se produise sont les suivantes :
- Un bon entretien du compresseur pour assurer que de l’air propre et sec est utilisé lorsque les bouteilles sont remplies, comme indiqué dans la version de 2019 de la norme 1989 de la National Fire Protection Association (NFPA) sur la qualité de l’air respirable pour la protection respiratoire des services d’urgence ainsi que dans la norme Z180.1-13 de la CSA sur l’air comprimé respirable et les systèmes connexes
- L’adoption de méthodes appropriées de nettoyage et de désinfection du régulateur monté sur le masque et le masque en soit, y compris le séchage, pour minimiser la présence d’humidité au moment de l’entreposage
- Lors des interventions, s'assurer que les parties faciales et les régulateurs ne sont pas laissés à l'air libre pendant les périodes de températures hivernales devrait aider à prévenir les problèmes liés au froid :
- a. L’utilisation d’un séchoir peut aider grandement à prévenir ce phénomène. Une distance suffisante devrait être maintenue pour s’assurer que les pièces de plastique composant le régulateur ou la partie faciale ne soient pas endommagées
- b. On ne doit pas dépasser la température maximale de 110°F / 43°C pour le régulateur ou la partie faciale
- c. La distance variera en fonction de l’intensité de la source de chaleur. Pour un séchoir, une distance de 15 à 20 cm devrait permettre d’obtenir de bons résultats sans altérer les composantes
- L’utilisation de procédures stratégiques de remise en état et de changement de bouteille qui protègent le régulateur monté sur le masque ainsi que le masque contre une exposition prolongée à des températures extrêmement froides lorsqu’il est mouillé ou bien, portée récemment
- Lorsqu’il est possible, l’entreposage de l’équipement dans des lieux chauds et secs. Les bouteilles doivent être remplies avec de l’air comprimé à une température de point de rosée inférieure de 5 °C (9 °F) à la plus basse température auquel une partie du système peut être exposée, devrait réduire l’englacement
- Pour l’ensemble des modèles, prendre en compte la possibilité d’utiliser un régulateur à raccord à débranchement rapide au moment de déterminer les caractéristiques techniques de l’APRIA et de l’acheter, permettant ainsi d’effectuer un remplacement rapide du régulateur sur place en cas de formation de givre ou de glace
Malgré cette mise en garde, des travaux de recherche devront être réalisés dans le but de comprendre davantage cette problématique. L’APSAM fera des démarches en ce sens auprès de ses partenaires.
Pour plus d'informations sur ce sujet, veuillez consulter la section protection respiratoire sur notre page Sécurité incendie.
Références :
- Répertoire toxicologique, CNESST, Avis de NIOSH aux utilisateurs, le 15 janvier 1982
- CSA Z-94.4-2018, Choix, utilisation et entretien des appareils de protection respiratoire, annexe D
- CDC / NIOSH, Working in Cold, Firefighter SCBA best practices when working in cold
- FEMA, Special Report: Prevention of Self-Contained Breathing Apparatus Failures, USFA-TR-088 / November 2001
- 3M, Scott, Bulletin destiné à l’utilisateur, 2020
- 3M, Scott, Guide d’utilisation de l’APRIA à basse température, 2019
- Manuel d’utilisation MSA G1, section 7.1 – fonctionnement par temps froid
- Sperian, WARRIOR™ Appareil respiratoire autonome, 2007, opérations et entretien par temps froid, p.31