Un collègue ne dira pas nécessairement qu’il ne va pas bien, mais vous pourriez avoir remarqué des changements dans ses comportements et attitudes. Par exemple, vous remarquez qu’il s’isole au travail ou dans sa vie personnelle, qu’il est plus fatigué qu’à l’habitude, plus irritable, rit moins, est d’humeur triste ou qu’il manque des journées de travail. Dans les interventions, vous remarquez qu’il n’est pas concentré, moins alerte dans certaines tâches ou moins fonctionnel, moins confiant ou trop prudent dans des interventions de routine, plus émotif, perd son calme, parle plus fort ou devient plus irritable.
Si un collègue vous parle de plusieurs réactions de stress post-traumatique qu’il a, telles qu’énumérées à la section Généralités, il pourrait être possible qu’il présente un trouble de stress post-traumatique. Cependant, attention de ne pas faire vous-même de diagnostic, encouragez-le plutôt à chercher de l’aide.
Parfois, d’autres problèmes peuvent masquer des réactions post-traumatiques ou être présents en même temps que le stress post-traumatique, comme le fait de consommer en plus grande quantité (alcool, drogues ou médicaments d'ordonnance), avoir des comportements autodestructeurs, prendre des risques inutiles ou présenter des idées suicidaires, avoir des problèmes conjugaux, être d’humeur dépressive, etc.
Pour en savoir plus :
L’APSAM vous invite également à visionner la capsule vidéo 1 – Reconnaître qu’un collègue va moins bien et apprendre à se connaître. |
N’hésitez pas à être proactif lorsque vous remarquez qu’un collègue ne va pas bien. Les policiers sont formés pour rester forts et en contrôle. Toutefois, ce sang-froid dont ils doivent faire preuve au quotidien pourrait les empêcher de demander de l’aide. Pour certains policiers, cet appel à l’aide démontrerait leur vulnérabilité.
Pour approcher un collègue, faites-le discrètement de façon individuelle et au moment opportun. Commencez par lui dire ce que vous avez remarqué chez lui qui vous laisse croire qu’il ne va pas bien (ex. : « j’ai remarqué ces derniers temps que tu t’isolais du groupe »; « j’ai remarqué que tu étais plus irritable »). Faites-lui part de vos inquiétudes. S’il reconnait qu’effectivement il ne va pas très bien, vous pouvez lui demander ce qui se passe pour en apprendre plus, puis demandez-lui ce que vous pouvez faire pour l’aider. Rassurez-le que ce qu’il vous dit va demeurer confidentiel. S’il n’est pas ouvert à en parler présentement, faites-lui savoir que vous restez disponible s’il souhaite vous en parler à un autre moment.
Soyez proactif en lui demandant la permission de reprendre de ses nouvelles dans une semaine pour voir comment il va (ex. : « si c’est correct avec toi, je vais te redemander comment tu vas dans quelques jours et d’ici là, reviens me voir si t’as besoin de quoi que ce soit »). Il est possible que votre collègue ne reconnaisse pas qu’il a des difficultés. Il n’est pas rare que ce soit les autres qui voient les changements avant la personne concernée. Votre intervention auprès de lui pourrait l’amener à s’observer davantage dans les jours suivants et à remarquer des changements qu’il n’avait pas vus auparavant. Si vous vous sentez à l’aise, retournez le voir une semaine plus tard pour voir son ouverture à parler de ce qui ne va pas.
Si vous remarquez qu’il est ébranlé depuis la survenue d’un événement traumatique, questionnez-le à savoir :
- Est-il vraiment prêt à revivre un autre événement marquant s’il continue de faire son travail habituel?
- A-t-il l’énergie nécessaire pour revivre un autre événement?
- Se sent-il capable de faire son travail de façon sécuritaire?
Proposez-lui des solutions comme d’en parler au sergent, à un représentant syndical, de voir un moniteur en emploi de la force, d’aller consulter un médecin, un psychologue ou un psychothérapeute. Vous pouvez lui proposer de l’accompagner dans ces démarches, par exemple, d’appeler ensemble le programme d’aide aux employés (PAE) ou une autre ressource pouvant l’aider. Et puisque vous êtes son partenaire, continuez de veiller avec bienveillance sur lui. La bienveillance plutôt que la surveillance est de mise.
Si vous craignez qu’il présente des idées suicidaires
N’hésitez pas à lui poser directement la question : « as-tu des idées suicidaires? » ou « penses-tu au suicide? ». S’il répond oui, vérifiez : « as-tu un moment déterminé pour le faire et par quel moyen? ». Démontrez votre bienveillance en disant : « je suis inquiet, c’est pour ça que je pose la question ». Faites l’évaluation de la dangerosité de la même façon que vous le faites avec des citoyens. Ne restez pas seul avec cette information.
Si l’urgence n’est pas imminente : demandez-lui à qui vous pouvez en parler ensemble, que ce soit son sergent, son partenaire, son représentant syndical, son conjoint ou sa conjointe, un ami ou un membre de la famille. Vous pourriez lui dire : « c’est trop important pour que je reste seul avec ce que tu viens de me confier, à qui je peux en parler et comment veux-tu qu’on lui en parle? ».
Assurez-vous que l’autre personne sera un allié et non pas une personne avec qui le policier est en conflit. De façon discrète, parlez-en ensemble à cette autre personne pour établir un filet de sécurité et veiller ensemble à son bien-être. Vous voulez mobiliser l’autre dans des comportements de soutien. Vous pourriez lui dire : « cette personne ne va pas bien ces temps-ci, peux-tu veiller sur elle? Elle aurait besoin de rester entourée dans les prochains jours ».
Encouragez-le à consulter et proposez-lui d’appeler ensemble le programme d’aide aux employés (PAE) ou une autre ressource pouvant l’aider (ex. : Ligne québécoise de prévention du suicide). Prenez de ses nouvelles dans les prochains jours et pour un certain temps, jusqu’à ce que vous constatiez qu’il va mieux et rappelez-lui « je tiens à toi ».
Si le risque de passage à l’acte est grand ou imminent : vous devriez aller voir ensemble un supérieur. Selon la situation, vous pourriez aussi inviter le policier à vous remettre son arme le temps qu’il aille mieux. Dans tous les cas, parlez-en à un supérieur. Vérifiez également s’il possède des armes à feu à la maison afin de les placer en lieu sûr. Référez-vous à la procédure de votre service concernant le désarmement dans une telle situation.
Si vous voulez des conseils et des moyens concrets pour soutenir une personne ayant des idées suicidaires, vous pouvez :
- Appeler la Ligne québécoise de prévention du suicide : ligne d’écoute accessible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 : 1 866 APPELLE (1 866 277-3553).
- Visiter le site de l’Association québécoise de prévention du suicide Commentparlerdusuicide.com, qui fournit entre autres des informations si vous êtes inquiets pour un proche.
- Consulter le site suicide.ca : service numérique québécois en prévention du suicide (gratuit, bilingue et confidentiel). Vous y trouverez notamment de l’information et des conseils pour les proches, en plus d’avoir la possibilité de communiquer avec un intervenant par téléphone, texto ou clavardage.
Quoi faire dans l’immédiat après un événement traumatique?
Les comportements aidants dans l’immédiat (soit dans les premières heures et premiers jours) après un événement traumatique devraient viser à :
- sécuriser
- calmer
- soutenir
- réconforter le policier.
Un événement traumatique fait vivre une grande dose d’émotions fortes et très intenses qui activent le système nerveux sympathique. Lorsque le danger est passé, le système nerveux a besoin de faire le retour au calme et cela prend un certain temps avant que l’adrénaline soit réabsorbée.
Ce qui est considéré comme aidant :
- Offrir une présence calme et rassurante pour l’aider à faire le retour au calme.
- Ne pas l’amener à parler des détails émotionnels de l’événement (ne pas demander « parle-moi de comment tu t’es senti pendant l’événement »), ce qui pourrait être déstabilisant, activer le système nerveux sympathique et renforcer les souvenirs traumatiques.
- Si votre collègue exprime ses émotions de façon spontanée et volontaire, valider ce qu’il vit (« c’est vrai que ça doit être difficile », « je peux comprendre que tu sois bouleversé »), mais n’insistez pas pour qu’il s’épanche sur ses émotions. Respecter les silences ou son refus de parler.
- Répondre à ses besoins immédiats ou préoccupations (« qu’as-tu besoin? », « qu’est-ce que je peux faire pour toi? »).
- Le soutenir (ex. : faire preuve d’empathie, donner de l’information utile, apporter une aide concrète, rester disponible).
Quoi faire dans les jours suivant un événement traumatique?
Vous avez remarqué qu’un collègue va moins bien et vous voulez l’aider, mais vous ne savez pas quoi faire. Il arrive que les collègues se sentent impuissants parce qu’ils ne savent pas comment aider ou quoi dire pour que l’autre aille mieux. Voici quelques comportements aidants :
- Lui faire savoir que vous êtes disponible pour l’écouter.
- Lui permettre de vous reparler de l’événement si c’est son souhait.
- Être tout simplement présent.
- Normaliser ses réactions et émotions « après un tel événement, c’est normal que tu réagisses ainsi ou que tu ressentes cela ».
- Lui offrir de se changer les idées en proposant une activité.
- L’encourager à parler de ses craintes à son supérieur.
- L’encourager à chercher de l’aide professionnelle, au besoin.
- S’il est en arrêt de travail : maintenez le contact avec lui.
Malgré votre bonne intention d’aider votre collègue, il peut arriver que certains comportements n’aident pas les personnes qui ont des réactions post-traumatiques. Prenez le temps de lire ce qui n’aide pas ci-dessous. Si vous repérez un comportement que vous avez, ce sera l’occasion de réviser vos habitudes.
Ce qui n’aide pas :
- Juger ses réactions ou ses actions pendant l’événement ou après.
- Insister pour qu’il vous raconte son événement en détail ou à l’opposé l’inciter à cesser complètement d’y penser ou « tourner la page ».
- Invalider ses sentiments : « tu ne devrais pas être en colère, cela ne t’aide pas »; « tu ne devrais plus être craintif sur les interventions, c’est passé ».
- Le blâmer ou le critiquer pour ses difficultés.
- Minimiser ce qu’il vient de vivre parce que l’intervention s’est bien terminée.
- Banaliser une intervention considérée comme faisant partie des affaires courantes (ex. : accident mortel).
- Comparer son expérience à d’autres policiers qui ont vécu pire.
- Parler dans son dos.
- L’exclure du groupe.
Saviez-vous que d’après une étude scientifique effectuée dans le milieu policier québécois, le soutien des collègues est le meilleur facteur de protection contre le développement du trouble de stress post-traumatique chez les policiers? Votre soutien peut faire la différence pour aider votre collègue à mieux s’adapter après un événement traumatique. À l’inverse, un climat de travail malsain ou des jugements peuvent nuire au rétablissement des policiers.
En tant qu’équipe de travail, démontrez votre solidarité envers les policiers impliqués dans un événement, faites-leur savoir qu’ils peuvent compter sur vous ou vous en parler. Veillez à ne pas juger ou critiquer les réactions et comportements de vos pairs pendant ou après leur intervention. Bien doser l’humour policier.
Pour en savoir plus :
L’APSAM vous invite également à visionner les capsules vidéos suivantes :
2 – Se soutenir entre collègues et utiliser des stratégies d’adaptation gagnantes après un événement marquant.
3 – Mettre en place des actions positives entre collègues après un événement marquant
Elles sont disponibles dans la page Stress post-traumatique : capsules d'information.
Autre document pertinent :
Comment soutenir un collègue qui fait face à des difficultés de santé mentale (Institut canadien de recherche et de traitement en sécurité publique, PSPNET)
Pour en apprendre davantage sur le stress post-traumatique chez les policiers, consultez nos autres pages Web développées sur ce sujet.